Comment enseigner des comportements sains aux ados ?

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Si vous avez déjà donné des cours relatifs à la santé, vous avez déjà certainement ressenti cette désagréable impression de « prêcher dans le vide ». Et ça, c’est au mieux. Au pire, vous avez l’impression de passer pour un vieux coincé qui fait la morale aux jeunes.

La question est simple : comment faire en sorte que vos cours servent réellement à vos élèves en matière de santé ? Il ne suffit pas qu’ils répondent correctement aux interrogations et examens. S’ils continuent à mettre à mal leur santé par des pratiques à risques comme le tabac, l’alcool, les drogues, une alimentation déséquilibrée, etc., le cours n’a pas eu le moindre impact sur leur vie quotidienne.

Alors comment faire pour agir réellement sur les comportements à risque pour la santé, lorsqu’on s’adresse à des adolescents ?

En aucune manière, les arguments rationnels n’auront un impact en eux-mêmes. Vous pourrez expliquer tous les dangers du tabac sur la santé, ça n’aura en réalité pas plus d’impact que les messages sur les paquets de cigarettes. Bien sûr, il est important d’expliquer ces risques, ça fait d’ailleurs probablement partie de la matière du cours, mais savoir qu’un comportement est dangereux n’implique pas de l’abandonner… surtout à l’adolescence.

Il faut agir sur l’identité ! Les théories en développement personnel sont pour cela d’une aide importante (notez que les théories psycho-pédagogiques ne nous apprennent pas grand-chose là-dessus). Anthony Robbins, par exemple, met l’accent sur les associations neurologiques. Tout individu va associer certains comportements au plaisir et d’autres à la peine. Et ces associations sont beaucoup plus puissantes que le raisonnement intellectuel.  C’est ce qui explique la difficulté d’arrêter de fumer. Les fumeurs savent que fumer est dangereux, mais la peur de l’effort qu’ils devront faire pour arrêter les empêche d’arrêter. La douleur qu’ils associent au fait d’arrêter de fumer est plus forte que la connaissance des risques de la cigarette.

A l’adolescence, l’un des enjeux fondamentaux est l’image que les autre ont de soi, la reconnaissance, l’acceptation par les autres. Et qu’on le veuille ou non, pour beaucoup (et les médias ont leur part de responsabilité), fumer, c’est « cool » ; boire, « ça fait cool », la junk food, « c’est cool » aussi… Dit autrement, vous aurez remarqué que dans les classes d’âge au-dessus, disons, de 16 ans, il est plus facile pour un élève d’être valorisé par les autres s’il dit qu’il fume, s’il fait part de ses récits de beuveries, s’il revendique la consommation de drogues douces, etc. Et inversement, quelle image aura l’élève qui dit n’avoir jamais fumé, ne jamais boire d’alcool, manger régulièrement des fruits et légumes ?

C’est même le danger de tous les cours sur la santé avec des adolescents. En tant que prof, j’ai remarqué que ces cours pouvaient avoir l’effet opposé à ce qui était recherché : celles et ceux qui consommaient le plus de drogues (en ce compris tabac, alcool, etc.) participaient le plus au cours et se valorisaient par là, au détriment des autres qui n’en consommaient pas, ou moins. Le cours sur les risques de la consommation de drogues sur la santé risquait finalement de susciter cette consommation.

Mais prendre conscience de ces associations entre un comportement et une image permet d’agir sur celle-ci. Il s’agit de la casser. Anthony Robbins cite cet exemple avec ses propres enfants : pour être sûr qu’ils n’associent rien de positif avec la prise de drogue, il les amena, avec un ami de l’Armée du Salut, dans un immeuble squatté par des junkies, défoncés, en manque, en crise, etc. Le but était qu’ils associent définitivement la prise de drogue avec cette image de déchéance, de crasse, de douleur.

Mais inversement, on peut également tenter d’associer les comportements positifs avec une image positive. Il faut donc trouver des exemples positifs, de jeunes « cools » qui ne fument pas, boivent modérément, ne se droguent pas, mangent sainement.

Pour cela, j’utilise depuis plusieurs années la référence aux « Straight-Edges ». Les straight-edges représentent une mouvance issue du punk-hardcore. Leur but est de garder une certaine indépendance d’esprit, de garder un contrôle sur soi, contrairement aux personnes sous influence d’alcool ou de drogues. L’image est déjà différente : ils ne sont pas trop coincés pour fumer, boire, etc., ils ont décidé de ne pas le faire, pour rester libres ! On est déjà dans un comportement qui parle aux adolescents ! Et qui est valorisant !

Le meilleur matériel pédagogique que j’ai trouvé, ce sont les vidéos publicitaires pour le mouvement straight-edge, que voici :

Je les diffuse en classe, et je traduis. Voilà donc des jeunes qui sont loin d’être coincés, ils sont tatoués, ils écoutent de la musique que tous les ados n’aiment pas nécessairement, mais qui, à leurs yeux, n’est pas ringarde. Ce sont même des caïds, des « tough guys », et pourtant ils ne fument pas, ne boivent pas, sont végétariens, etc. !

L’association neurologique est brisée. Et c’est le plus important ! La non-consommation de drogue, de tabac, etc., peut être valorisée ! Et là, votre cours sur la santé pourra avoir un impact sur la santé de vos élèves.

En conclusion, que vous enseigniez des choses relatives aux drogues et assuétudes, à l’alimentation, à l’hygiène, etc., que devez-vous faire ?

Trouvez des exemples :

  1. de jeunes qui ont CHOISI des comportements sains ET
  2. qui présentent une identité valorisée, valorisable, à laquelle on voudrait s’identifier.

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