Twitter : les perles de la “police de la pensée”

Un débat anime actuellement le petit monde de Twitter (en Belgique) : une chroniqueuse-journaliste “aurait” été virée de la chaîne de télévision RTL-TVi suite à des propos politiques. Honnêtement, personne n’en sait rien, la chaîne a démenti toute pression politique, et tout cela ressemble fort au siècle dernier, quand “la politique” se limitait à ce qu’il se passait dans les partis et sur les plateaux de télévision.

Mais le débat agite Twitter et ça permet de récolter quelques perles de la “police de la pensée”, comme ci-dessus…

Alors, en fait, OUI, la liberté d’expression protège aussi le mensonge (et encore plus la propagande évidemment !). Les seules limites à la liberté d’expression sont l’incitation à la haine raciale, à la discrimination et la violence, ainsi que la diffamation (c’est-à-dire porter préjudice à quelqu’un en l’accusant d’un fait sans en avoir la preuve).

A l’exception de ces cas-là, on a le droit de tout dire, même des choses fausses, même des conneries, même des mensonges. L’inverse serait compliqué : ça impliquerait qu’on puisse déterminer ce qui est vrai et ce qui est faux, ce qui est intelligent et ce qui est très con. Par exemple, quelqu’un a le droit de dire que la terre est plate. C’est con, c’est faux… c’est un mensonge. Mais il a le droit de le dire.

En France, dans un arrêt du 10 avril 2013, la Cour de cassation a rappelé que “la liberté d’expression est un droit dont l’exercice ne revêt un caractère abusif que dans les cas spécialement déterminés par la loi, et que les propos reproduits, fussent-ils mensongers, n’entrent dans aucun de ces cas”. La Cour de cassation a effectivement estimé que condamner quelqu’un pour “mensonge” constituait une violation de l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme.

Bref, c’est immoral de mentir, mais la liberté d’expression le permet.

Déjà Kant, qui n’était pas chaud-chaud d’admettre le mensonge, vu que ça allait à l’encontre de la “vertu”, accordait quand même que le mensonge était acceptable tant qu’il ne portait pas atteinte à autrui (ce qui rejoint bien l’idée de “diffamation”).

On pourrait également citer John Stuart Mill qui expliquait admirablement bien que c’est précisément la liberté d’expression qui permet l’émergence de la vérité. Ce n’est pas que la liberté d’expression empêche le mensonge, c’est que l’absence de liberté d’expression empêche la vérité.

Mon conseil : je me méfie toujours le plus des gens qui veulent en empêcher d’autres d’exprimer leurs opinions. Je suis convaincu (et je reprends cette idée à Nassim Nicholas Taleb) que la meilleure manière de reconnaître un fasciste (qu’il soit de gauche, de droite, du centre, ou d’en face) est sa propension à vouloir limiter la liberté d’expression des autres… Méfiez-vous de toutes celles et ceux qui veulent en faire taire d’autres.

Il n’y a pas de meilleur indicateur que quelqu’un est un vrai démocrate que sa propension à accepter que d’autres expriment des avis totalement contraires aux siens.