Tribune de G. Schwarz : Pour combattre les populistes, il faut casser leur mythe victimaire

Très bonne tribune de Géraldine Schwarz (essayiste franco-allemande), dans Le Monde, il y a quelques jours. Elle y décrit le mythe victimaire des mouvements dits “populistes” et leur caractère infantilisant.

Face à cela, il ne faut pas tomber dans le discours bien-pensant, un peu “neu-neu”, et toujours enclin à la moquerie ou à la censure morale. Il faut réagir et Gérladine Schwarz lance quelques pistes de réponse, en matière de participation et d’éducation politique.

Je vous mets ici quelques extraits, parce que le texte est réservé aux abonnés. Je trouve chacun des extraits extrêmement intéressants !!

“Le mythe victimaire est une clé centrale de la stratégie des populistes, en France et ailleurs. Pour le cultiver, ils recourent à la provocation dans le but d’être frappés d’un ostracisme qui les enveloppera de l’aura du martyr. Plus la réaction de l’adversaire répond aux clichés d’un ennemi diabolisé, plus ils sortent triomphants de ce jeu de rôle – “eux” contre “nous”. Ils deviennent les chantres de la liberté d’opinion ayant le courage d’édicter des vérités interdites sur une nation supposée en plein déclin, rongée par ennemis intérieurs et extérieurs. Ils deviennent les sauveurs du peuple dont ils seraient les seuls à avoir compris les besoins et la volonté.

(…)

“Le peuple c’est nous” (“Wir sind das Volk”) (…) Qu’ils soient de droite ou de gauche, ils se servent du “peuple” comme prétexte, l’instrumentalisent en le faisant passer pour un bloc homogène incapable de nuances et de différences, comme si “le peuple”n’était apte qu’au ressentiment et à la haine.

Ils font miroiter aux citoyens qu’ils leur rendront la maîtrise de leur destin, un contrôle digne d’une “vraie” démocratie, alors qu’en réalité leur paternalisme revient à infantiliser la population et augure de dangereuses dérives antidémocratiques. Car prétendre être l’émanation d’une volonté populaire dont eux seuls ont le secret ne revient-il pas à dire : “Le peuple c’est moi” – et donc à se passer de l’avis de ce dernier ?

Pour combattre les populistes, il faut casser leur mythe. Refuser de les confronter, c’est gâcher une occasion de les contredire. C’est leur faire cadeau d’un aveu public de faiblesse.

(…)

Cependant, le succès des populistes est aussi le symptôme de préoccupations légitimes de la population auxquels il faut répondre honnêtement : identité, islam, réfugiés, mondialisation, inégalités sociales. Cessons de nous réfugier dans le conformisme et la bien-pensance qui exerce une censure morale, empêche des courants de s’exprimer, et finit par faire le jeu des populistes.

(…)

N’oublions pas que le moyen le plus sûr de lutter contre le populisme reste de donner au citoyen les moyens de s’exprimer et de participer, mais aussi de se forger une culture politique et démocratique – y compris avec le soutien des entreprises, à travers des fondations comme c’est le cas en Allemagne.

Le centralisme français, l’infantilisation de la société et le manque d’éducation politique constituent un obstacle majeur au rapprochement du citoyen et du pouvoir et à l’ancrage de la démocratie en France.”

Géraldine Schwarz (essayiste franco-allemande).

Article : “Pour combattre les populistes, il faut casser leur mythe victimaire” : Version papier du jeudi 29 août 2019.

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Pour aller plus loin : ça rejoint certaines choses que j’ai écrites ici :

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