Louis XI dans la littérature classique

Ce week-end (11-12 sept. 2021), ce sont les Journées médiévales Louis XI à Genappe… Peut-être est-ce l’occasion de découvrir (ou redécouvrir) la présence de ce Roi de France, qui a passé 5 ans à Genappe, dans certaines des plus grandes oeuvres de la littérature française !

Quasimodo amoureux d’Esméralda, par exemple, ça se passe sous Louis XI.

Victor Hugo, Honoré de Balzac, Alexandre Dumas (pour ne citer qu’eux)… ont décrit Louis XI. Parfois en tronquant un peu la réalité historique ! En voici une mini-synthèse…

Pour situer : Louis XI vit et règne à la fin du 15è siècle. C’est une période de transition, entre le Moyen-Âge qui se termine et la Renaissance qui ne va pas tarder à arriver. Et toute l’image de Louis XI dans la littérature française classique est marquée par cette dualité : dernier roi “médiéval” pour certains, premier roi “moderne” pour d’autres.

Certains le décrivent encore comme un obscurantiste, tyran, barbare, rongé par les superstitions, alors que d’autres en font déjà une figure anticipée des Lumières : un roi qui a compris que la classe montante était la bourgeoisie et qu’il fallait s’appuyer dessus pour unifier le pays.

La vérité historique est probablement un peu plus mitigée. Ce qui est sûr, c’est que Louis XI incarne souvent le déclin des valeurs féodales. Dans la littérature, “LE” roi médiéval classique, typique, héroïque et chevaleresque, c’est Charlemagne. Et tout au long du Moyen-Âge, les rois ont dû un peu se conformer à cette image. Mais Louis XI en incarne souvent le contraste.

Balzac en fait même un personnage presque rabelaisien : bon vivant, un peu grivois, grossier, etc. Il lui consacre tout un conte dans ses “Contes drôlatiques” (1832-1837) : “Les Joyeulsetez du roy Loys le unziesme”. Il le décrit comme “un bon compaignon aymant beaucoup à jocqueter”.

[le mot “jocqueter”, on le retrouve aussi chez Rabelais. Ca vient de “jodus” chez les Romains : la plaisanterie, le jeu. Les anglais en ont gardé le mot “joke”, signifiant plaisanterie, blague, qu’on retrouve aussi dans le personnage du “Joker” ! ]

Et Balzac rajoute : “il estoyt un bon amy (…) et rieur comme pas ung”.

Un exemple de ses “plaisanteries” ? Avec une de ses maîtresses, Nicole Beaupertuys, il aurait ainsi servi un soir du vin mélangé avec du laxatif à ses convives. Gros niveau de blague, quoi ! 😳 😅 Hahaha

La description des conséquences par Balzac, à une époque où il n’y a pas vraiment de toilettes dans les châteaux, est assez comique… mais dégoûtante !! 🤢 😁

Plus largement, Louis XI est décrit comme un roi qui n’a pas la classe et la prestance de la noblesse. Alexandre Dumas dit de lui dans “Charles le Téméraire” (1857), qu’il est “moins bien vêtu que les chevaux du duc !”. Il le décrit comme “humble, pauvre et chétif”, et lorsque le roi Louis XI marchait devant le duc, on aurait dit “un valet précédent son maître” !

On dit d’ailleurs souvent qu’il aimait se mêler à la population, et qu’il y passait tout à fait inaperçu. Ce n’est probablement pas pour rien que, dans “Notre-Dame de Paris”, Victor Hugo le met en scène se faisant passer pour quelqu’un d’autre, le compère Tourangeau, lorsqu’il se rend à Notre-Dame pour rencontrer Frollo.

Et pourquoi veut-il le rencontrer ? Pour parler de la pierre philosophale bien sûr ! On retrouve là deux caractéristiques de Louis XI : ses superstitions et son goût pour les richesses (la pierre philosophale pourrait changer les métaux sans valeur en métaux précieux : argent, or).

Il y a plein de récits des superstitions de Louis XI, et de son rapport très particulier à la religion. Ainsi, Victor Hugo lui fait réciter une prière dans laquelle il demande pardon pour un crime… qu’il s’apprête à commettre ! 🙃

“Notre-Dame de Paris, ma gracieuse patronne, pardonnez-moi, je ne le ferai que cette fois”.

Un autre exemple classique de récit des superstitions de Louis XI, c’est le tour que lui a joué son astrologue Galeotti. On retrouve ce récit chez un auteur un peu moins connu du grand public, mais très influent dans la littérature du 19è siècle : Walter Scott. Dans sa nouvelle “Quentin Durward” (1823), il y relate cette histoire :

Louis XI veut faire exécuter son astrologue, Galeotti, qui l’avait mal conseillé. Mais Galeotti est un petit malin, et lui dit qu’il sait, par les astres, que 24 heures après sa propre mort, ce sera au tour de Louis XI d’y passer ! … Et c’est ainsi que Louis XI renonça à son exécution, et s’arrangea pour que Galeotti vive le plus longtemps possible ! Futé, n’est-ce pas ! 😉

Walter Scott écrit : “Et c’est ainsi que Louis, le plus avisé et le plus vindicatif des monarques de son temps, laissa échapper sa vengeance, grâce à l’influence de la superstition…”.

Voilà pour cette mini-synthèse de Louis XI sous la plume de Victor Hugo, Honoré de Balzac et Alexandre Dumas. Il y aurait aussi plein de choses à dire, plus au niveau politique, sur le règne de Louis XI qui consacre un peu le passage du féodalisme à la royauté et à la centralisation des Etats modernes.

Mais peut-être que ça donnera déjà envie à certains ou certaines de relire quelques-uns de ces textes classiques :

  • “Notre-Dame de Paris” de Victor Hugo (1831)
  • “Les Joyeulsetez du roy Loys le unziesme” d’Honoré de Balzac (1831)
  • “Charles de Téméraire” d’Alexandre Dumas (1857)

(Il existe aussi la pièce “Louis XI” de Casimir Delavigne, paru en 1832, mais probablement moins connue).

Tous ces textes sont dans le domaine public, donc disponibles en ligne.

Et si le sujet vous intéresse, je me suis pas mal basé sur l’article “Louis XI entre mythe et histoire”, d’Isabelle Durand-Le Guern, paru dans les Cahiers de recherches médiévales et humanistes, n°11, 2004.

Surtout, pour en savoir plus sur les Journées Louis XI à Genappe, c’est par ici : https://www.facebook.com/events/504854657497486 ou sur le site du Centre culturel de Genappe !

Au plaisir de vous y croiser ! 😉

Image de couverture : “Notre-Dame de Paris” (Victor Hugo) : le personnage de Gringoire devant Louis XI

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