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Aujourd’hui, j’avais envie de vous parler d’une personnalité peu connue des sciences sociales, mais dont les travaux sur la démocratie et l’éducation sont très intéressants : MARY PARKER FOLLETT, une philosophe, travailleuse sociale, spécialiste du management, née aux Etats-Unis en 1868 et décédée en 1933. Elle fut consultante également pour le Président Theodore Roosevelt.
Mary Follett a construit une approche sociale assez avant-gardiste pour l’époque, basée sur les relations sociales. Ainsi, par exemple, en management, elle fut parmi les premiers et premières à aborder les organisations comme des réseaux de groupes plutôt que comme des structures hiérarchiques.
Moi, ce qui m’intéresse le plus dans ses travaux, c’est son approche de la démocratie construite sur les groupes sociaux. Pour elle, la démocratie ne peut fonctionner que si les individus s’organisent en groupes locaux.
A partir de 1908, Mary Follett a cherché à surmonter l’apathie civique par l’engagement dans des groupes (églises, associations professionnelles, associations locales, groupes de jeunes, etc.). Elle a également essayé de créer un cadre local permettant d’intégrer ces groupes. Elle-même s’est engagée dans de nombreux projets communautaires et associatifs. Tout ça est rassemblé dans l’ouvrage “The New State”, publié en 1918. Sous-titre : “L’organisation en groupes, la solution au gouvernement populaire”.
Aborder la démocratie non pas par ses institutions, mais par les relations sociales entre individus, au sein de groupes composant la société, ça me semble être très pertinent. Ça l’était à l’époque. Ça l’est encore plus aujourd’hui.
Par exemple, elle rejette avec beaucoup de justesse les théories organicistes de la société (la vision de la société comme un organisme), qui font un retour aujourd’hui dans les dérives technocratiques que sont la sociocratie et l’holacratie. Je suis 100% d’accord avec elle lorsqu’elle dit que la démocratie est incompatible avec la théorie de la société comme un organisme.
Ce qui est très intéressant aussi, c’est qu’elle articule sa théorie de la démocratie (proche d’un Tocqueville, par exemple, sans qu’elle ne le cite) avec une théorie de l’éducation. Selon elle, être un démocrate, c’est apprendre à vivre avec les autres. L’apprentissage de la vie en société est donc fondamental pour elle, et ça passe évidemment par l’école.
L’appendice du livre “The New State” a comme titre “Training for the New Democracy”. Selon elle, la citoyenneté ne s’apprend pas dans des cours sur les gouvernements, mais dans la pratique, dans l’associatif local, dans l’engagement civique, et surtout à l’école par la collaboration. Follett met beaucoup l’accent sur les travaux de groupe à l’école. Pas seulement à des fins pédagogiques, mais également à des fins démocratiques. Et je trouve ça très intéressant, surtout en considérant que ça a été écrit il y a plus de 100 ans !
Si les sujets de la démocratie participative, construite par le bas, par le local, ainsi que le sujet des pédagogies participatives vous intéressent, je vous conseille de jeter un coup d’œil sur les travaux de Mary Parker Follett. Ses ouvrages sont, pour la plupart, libres de droit et disponibles en ligne (mais à ma connaissance, pas traduits en français).