Le 49.3 expliqué aux non-Français…

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Mais qu’est-ce que c’est que cette bizarrerie politique qu’est le 49.3 ? Je vais essayer de l’expliquer pour les non-Français, parce que c’est vraiment une spécificité française… mais les Français peuvent lire aussi ! 😉

Dans les faits, il s’agit de l’article 49 alinéa 3, de la Constitution française. Cet article permet au gouvernement français de faire adopter un texte de loi, sans qu’il ne soit voté par l’Assemblée. Mais ce faisant, il engage sa responsabilité, puisque l’Assemblée peut déposer une motion de censure. Si celle-ci est votée par une majorité, le gouvernement est contraint de démissionner.

Pour rappel, le fait que les lois soient le fruit d’un débat, d’une délibération et d’un vote d’un parlement est un des fondements de la démocratie. Tout comme la séparation des pouvoirs, c’est-à-dire entre les pouvoirs législatifs, exécutifs et judiciaires. L’élaboration des lois relève du pouvoir législatif, donc du parlement. Dans un système parlementaire classique, le gouvernement est par ailleurs responsable devant le parlement.

Mais la France a toujours eu un rapport… disons… “compliqué” avec son parlementarisme. Bien que quand on pense à la séparation des pouvoirs, on pense à un Français, Montesquieu (1689-1755), la Révolution française de 1789 n’a pas adopté le régime parlementaire. Nulle trace d’une séparation des pouvoirs, comme on l’entend aujourd’hui, dans les constitutions rédigées entre 1791 et 1804. Les révolutionnaires français rechignaient à imiter les Anglais et leur Constitution. En réalité — et cela peut paraître surprenant aujourd’hui — il faudra attendre la Restauration de la Monarchie et la Charte de 1814, sous Louis XVIII, pour trouver en France l’élaboration d’un régime parlementaire, cette fois-ci inspiré des Anglais. Cette Charte de 1814 restera comme une des plus libérales de l’époque, et influencera les constitutions de nombreux pays européens, dont en partie la Belgique et sa constitution de 1831. A la même époque, en 1830, la Monarchie de Juillet (Louis-Philippe Ier) renforce encore la lente apparition du parlementarisme en France.

C’est que durant tout une partie du XIXe siècle, le libéralisme politique se confond avec le constitutionnalisme parlementaire (Rousselier, 2002 : 629). Le parlementarisme apparait effectivement comme le meilleur garant des libertés publiques.

Mais le parlementarisme a aussi été, en France, une grande source d’instabilité durant les IIIe et IV Républiques (Audouy, 2016 : 1). Des majorités changeantes dans l’hémicycle, au gré des manigances politiques, renversaient et refaisaient les gouvernements. Durant la IIIe République (de 1871, après la chute de Napoléon III, à la proclamation du Régime de Vichy, en 1940), la France a compté 104 gouvernements ! Durant la IVe République (1947-1958), 24 gouvernements se sont succédé…

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