Qu’est-ce que la “démocratie libérale” ?

Suite à mon post précédent (le top 3 de mes lectures de 2022), il m’a été demandé en privé ce que j’entendais par “démocratie libérale”. Alors voici les 3 éléments de base d’un régime politique démocrate libéral, tel que celui que je défends.

Voyez ces 3 éléments comme les 3 “macronutriments” 🍗🥦🥑🍽 de l’assiette démocrate libérale, pour celles et ceux à qui cette analogie parle… 😉

1) C’est un régime “constitutionnel-pluraliste”. L’expression a surtout été employée par Raymond Aron. Cela signifie que l’on est dans un “État de droit”, qu’aucune personne, aucun pouvoir, n’est au-dessus de la loi, et que l’ensemble des pouvoirs est régi par une Constitution. Au sein de ce régime, il y a un pluralisme d’idées politiques portées par des partis, des mouvements, des personnes, en concurrence non-violente, pour l’accès au pouvoir. Un régime constitutionnel-pluraliste est l’opposé d’un régime autoritaire.

2) Il y a des limites au pouvoir de l’État. Cela ne signifie pas du tout qu’il ne doit pas y avoir d’État, mais simplement qu’il y a une frontière au-delà de laquelle l’État “se refuse”, en quelque sorte, d’intervenir. C’est l’idée que l’être humain a des droits “naturels” inaliénables. Au-delà d’une certaine limite, l’État laisse à l’individu sa liberté, son autonomie, sa capacité créatrice. Exemple : l’État se refuse de dicter la croyance religieuse, chaque individu a le droit de croire — ou ne pas croire — en tel ou tel Dieu ; c’est aussi dans ce cadre que l’on retrouve la liberté de penser, de s’exprimer, de s’associer, d’entreprendre, etc. Cela laisse donc toute une place à ce qu’on appelle la “société civile”. On retrouve ici des concepts comme celui de propriété, mais aussi celui de “commun” au sens d’Elinor Ostrom, ou d’auto-organisation. Dans un tel régime, l’État n’est pas “total”, une démocratie libérale s’oppose donc aussi à un régime totalitaire.

3) Les limites de l’État sont fixées démocratiquement. Cela découle directement du 2ème point : c’est en assemblées législatives, dans lesquelles tout citoyen, toute citoyenne, a un droit égal de participer (directement ou indirectement) que ces limites sont constamment discutées et rediscutées. Pour reprendre l’exemple précédent : chacun, chacune, a le droit de croire ou ne pas croire en tel ou tel Dieu, mais collectivement, l’ensemble des citoyens et citoyennes peuvent fixer des limites à certaines pratiques religieuses, comme l’abattage rituel, l’excision, etc. Autre exemple : il peut être décidé démocratiquement de mettre une limite à la liberté d’expression, en matière de propos xénophobes, négationnistes, etc. Ou encore : le droit de propriété peut avoir une limite, décidée collectivement, s’il s’agit de ressources naturelles. C’est ici que l’on retrouve l’idée du “Contrat social” de Rousseau. Et c’est toujours par le débat et la délibération en assemblées, potentiellement ouvertes à tout citoyen et toute citoyenne, que ces limites pourront être fixées. La démocratie libérale s’oppose donc à toute forme d’aristocratie ou d’oligarchie, y compris dans leurs formes modernes comme la technocratie.

Tout cela peut être affiné à l’infini, mais je m’étais donné le défi de le faire en moins d’une page A4 😉

Dans un monde où certains pays glissent vers des régimes illibéraux, voire autoritaires, où de plus en plus de personnes commencent à douter de la capacité de la démocratie à faire face aux enjeux actuels, glissant petit à petit vers des formes de radicalisme (souvent totalitaire) ou des formes de technocratie (sociocratie, management public, etc.), je souhaite vraiment défendre la démocratie libérale, cette pensée politique peut-être “la moins sexy du monde”, la plus modeste, mais je pense aussi, celle dont on a le plus besoin à l’heure actuelle…

Au plaisir d’en discuter, d’en débattre, avec toute personne intéressée ! 🙂

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