Brève réflexion : S’il fallait n’avoir qu’un seul objectif…

En cette période où on parle beaucoup de l’extrême-droite, du populisme, du totalitarisme, je voudrais expliquer quelque chose…

J’ai une partie de ma famille qui vit en Pologne (ma grand-mère était polonaise), et ça m’a permis, à deux reprises, de visiter Auschwitz. Je ne veux pas dire “la chance” de visiter Auschwitz, parce que ça me semblerait très mal approprié, mais ces deux visites m’ont vraiment marqué. Ca fait certainement partie des choses qui m’ont le plus marqué dans ma vie.

La première fois, j’avais 18 ans. Et je me rappelle très clairement que je m’étais fait cette réflexion : s’il y a un jour un parti politique qui se présente, et qui dit : “Nous n’avons pas de programme ‘a priori’ (pas d’idéologie toute faite). Nous n’avons qu’un seul but : que PLUS JAMAIS on n’arrive à quelque chose comme la Shoah”, je voterai pour ce parti.

Et depuis mes 18 ans (j’en ai 40), je me répète ça : il faudrait un parti qui, dans chaque domaine, observerait (étudierait, analyserait) ce qu’il faudrait faire pour que PLUS JAMAIS une partie de la population ait la volonté ET les moyens d’exterminer une autre partie de la population.

Donc :

  • Que faut-il faire en matière d’enseignement pour que plus jamais une partie de la population ait la volonté et les moyens d’exterminer une autre partie de la population ?
  • Quel type d’économie faut-il promouvoir pour que plus jamais une partie de la population ait la volonté et les moyens d’exterminer une autre partie de la population ?
  • Quel système politique faut-il mettre en place pour que plus jamais une partie de la population ait la volonté et les moyens d’exterminer une autre partie de la population
  • Quelle politique migratoire faut-il mettre en place pour que plus jamais une partie de la population ait la volonté et les moyens d’exterminer une autre partie de la population ?
  • Comment faut-il organiser la Justice pour que plus jamais une partie de la population ait la volonté et les moyens d’exterminer une autre partie de la population ?
  • Etc… (vous avez compris le principe).

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Brève réflexion sur l’interdiction du burkini

wannsee

Dans le livre “The Law in Nazi Germany: Ideology, Opportunism, and the Perversion of Justice” (2013), les deux auteurs, Steinweis & Rachlin, expliquent que le 22 août 1933, l’Allemagne nazie interdisait l’accès aux piscines et aux plages, aux personnes juives, comme par exemple la célèbre plage Wannsee, à Berlin (photo ci-dessus).

Dans ses “Réflexions sur la question juive” (1946), Jean-Paul Sartre interprète cette interdiction comme la croyance nazie selon laquelle la piscine entière serait “polluée” si un “corps juif” y plongeait… Mais Steinweis & Rachlin pensent qu’au-delà de cette obsession délirante pour la pureté, il s’agissait d’une volonté d’être “entre Aryens” sur la plage, sans contact avec des Juifs.

Ils relèvent d’ailleurs que cela n’était pas nouveau. Au 19ème siècle, sous le règne de Wilhelm II, entre 1890 and 1918, une chanson circulait déjà sur les plages de l’île allemande de Borkum (en mer du nord) :

“À Borkum, seul l’esprit allemand est en vigueur,
et seul l’allemand est notre bannière.
Nous maintenons pur l’honneur
De la Germanie et pour toujours!
Mais celui qui s’approche avec ses pieds plats,
Avec son nez crochu et ses cheveux crépus,
Celui-ci ne peut pas profiter de la plage.
Il doit partir ! il doit partir !”

C’est ce qu’on appelle, en allemand, le “Bäder Antisemitismus”, une expression qui désigne l’antisémitisme qui sévissait dans les stations balnéaires allemandes, avant l’arrivée du nazisme au pouvoir. En Autriche, on parle de “Sommerfrischen-Antisemitismus”, c’est-à-dire l’”antisémitisme des stations estivales”.

Le mardi 16 août 2016, une femme de 34 ans, portant un hijab, se voit demander par la police municipale de quitter la plage de Cannes, où elle se trouve avec son enfant, ou de payer une contravention. Autour d’elle, certains la défendent. Mais beaucoup se lâchent :

– “J’ai entendu des choses que l’on ne m’avait jamais dites en face, comme ‘rentrez chez vous !’ ‘Madame, la loi c’est la loi, on en a marre de ces histoires’, ‘Ici, on est catholiques !'”

Derrière cette histoire de burkini, est-ce que la plage ne devient pas un espèce de lieu d’ “entre-soi” où pour certains, se délasser signifie “être avec des gens qui me ressemblent et surtout pas avec celles et ceux qui me sont étrangers” ? N’est-ce pas une manifestation de la xénophobie (donc la “peur de ce qui est étranger”) qui se développe actuellement, en partie à la suite des attentats ?
Comment expliquer qu’il y ait un terme spécifique pour qualifier l’antisémitisme des stations balnéaires ? Comment expliquer que la question du voile reprenne autant de vigueur sur un lieu aussi a-politique, a priori, qu’une plage de vacances ?