Ne laissons pas la défense des petits indépendants à la droite réactionnaire (et raciste)…

b9454c009ffc9504e2c950b71ee85fb1 copie

Je voulais réagir à un article qui fait son petit buzz sur les réseaux sociaux, en ce moment, en Belgique : “L’Etat a tué mon resto préféré“. Le titre résonne évidemment avec ce que j’ai pu écrire sur l’Etat bureaucratique dans le cadre de l’ “Empowerment ou la société de l’anti-délégation“.

Le restaurant dont il s’agit, c’est “Bleu de Toi”, à Bruxelles, qui a dû fermer récemment. Le premier paragraphe nous dit que “la courageuse restauratrice met la clef sous le paillasson après 22 ans. Encore un exemple de gâchis extraordinaire parce que nos politiciens n’ont pas compris que les petits indépendants sont ceux qui créent le plus d’emplois, qui dynamisent notre économie. Or, ils doivent, plus que d’autres supporter une fiscalité écrasante.”

Evidemment, en tant qu’indépendant moi-même, chef de très (petite) entreprise, je ne peux que confirmer la situation difficile de l’entrepreneuriat en Belgique (mais j’imagine que ce n’est pas tellement différent en France). Tout se passe comme si l’Etat n’était là que pour empêcher le développement de toute activité économique indépendante. Une liste infinie de réglementations, de taxations plus ou moins justifiées, d’entraves, de “bâtons dans les roues”, rend, comme le dit l’article, “la vie d’indépendant en Belgique extrêmement périlleuse“. Chaque semaine, on parle dans la presse d’une enseigne qui doit fermer, submergée par les entraves administratives, comme cette boucherie de près de 100 ans, à Pépinster , en Belgique.

J’affectionne tout particulièrement l’activité d’indépendant en ceci qu’elle représente une manière de reprendre en main son activité professionnelle, donc une forme d’Empowerment, comme j’essaie de l’expliquer ici.

Dans un des chapitres (“La crise de la délégation“) de ce livre en construction, j’explique à quel point un Etat bureaucratique comme on connaît actuellement, “despotique” comme disait Tocqueville, freinait tout développement de la société civile.

Je partage donc le constat initial de l’article…

MAIS…  le problème est que l’article se poursuit sur les causes prétendues de cet abandon (de ce sacrifice ?) des indépendants par l’Etat : “On préférera aider les réfugiés politiques fraîchement arrivés en Belgique ou les clandestins de Lampedusa… “, peut-on lire. Et l’article d’attaquer les “inénarrables associations antiracistes“, qui aideraient les réfugiés à profiter de notre sécurité sociale. Pour se conclure sur cette affirmation selon laquelle “la Belgique est un pays fait non pour les indépendants mais pour les chômeurs, les pensionnés, les inactifs et les fonctionnaires.

Le fait est que l’article en question est publié sur le site “Le Peuple – Quotidien belge de combat pour nos valeurs“. Il s’agit en fait de l’organe de presse du “Parti Populaire“, un parti à droite. Fort à droite. Fort, fort à droite.

Bien sûr, ce parti ne se dira pas “raciste”. Et ne se laissera pas traiter de “raciste”. Le premier chapitre de son programme politique concerne néanmoins l’immigration, et on y retrouve tous les clichés de l’extrême-droite raciste : trop d’immigrés, qui profitent de “nous”, qui détruisent notre civilisation, etc. Le programme fait même une distinction entre les “Belges de souche” et les Belges “qui (ont) un parent étranger” (p.13*). Ou encore une distinction entre les “véritables réfugiés politiques et religieux” et les “faux réfugiés économiques“, comme s’il était justifié d’émigrer si on risquait d’être tué pour ses convictions politiques ou religieuses, mais injustifié d’émigrer si nos enfants risquaient de mourir de malnutrition…

3df58d98847161880eae5fa7149a5ffc

Ce que ce genre de partis d’ “ultra”-droite ne voient pas, c’est que c’est le même système étatique, hyper-réglementariste, qui entrave l’activité entrepreneuriale ET qui entrave les capacités d’émancipation des populations immigrées. Si on s’accorde sur les innombrables obstacles que doit surmonter le candidat entrepreneur qui veut développer sa petite activité économique, on imagine bien que c’est encore bien plus compliqué pour celui ou celle qui voudrait le faire dans un pays où il vient de débarquer, dont il ne connaît pas encore tout à fait la langue, ni les subtilités administratives et institutionnelles ! C’est que la plupart des immigrés n’étaient pas des “assistés sociaux” dans leur pays d’origine (beaucoup viennent d’ailleurs de pays où l’aide sociale est beaucoup moins développée qu’en Europe de l’Ouest). Et s’ils ont envie de développer une petite activité économique dans leur pays d’accueil, c’est-à-dire “chez nous” – de l’artisanat, du commerce, de l’Horeca – ils se verront confrontés exactement aux mêmes difficultés que tout entrepreneur belge, la méconnaissance du pays en plus.

Ce n’est pas l’immigration en soi qui crée l’assistanat social, c’est tout ce qui empêche de développer aisément son activité professionnelle, c’est-à-dire de se créer ses moyens de subsistances. Qu’on soit autochtone ou immigré.

161f4061dbe451323190cfbbc59acab4

L’enjeu, à propos de cet article, est de ne pas laisser à la droite réactionnaire (et raciste) le monopole de la défense des petits indépendants.

Je suis un indépendant, un entrepreneur, un chef de petite entreprise, relativement jeune, et je ne me reconnais pas du tout dans un parti réactionnaire comme le Parti Populaire qui veut, entre autres, réinstaurer des contrôles aux frontières (p.71), mettre sur pied une politique nataliste (p.75), défendre la famille nucléaire traditionnelle (p.77), rejeter la théorie du genre (p.77), ou encore instaurer des centres d’encadrement pour “remettre sur le droit chemin” des jeunes ayant commis des “faux pas” : “des centres d’encadrement de type militaire, permettant la formation de l’esprit et au travail, le goût de l’effort et la discipline” (p.48)… … What the F*** ???

Et je crois ne pas être le seul. Il y a toute une nouvelle génération d’entrepreneurs, d’indépendants, de free-lance en tout genre, qui sont plutôt progressistes, plutôt ouverts, peut-être à gauche, ou qui, tout du moins, ne se reconnaissent pas du tout dans les politiques de droite traditionnelle.

Je fais ici référence au Parti Populaire, parce que l’article y était lié, mais je ne me reconnais pas plus dans la droite libérale institutionnelle du MR, ou en France dans l’UMP, l’UDI, ou dans les partis de droite souverainistes comme  “Debout la République” ou le “Mouvement pour la France”.

Je pense que ces nouveaux entrepreneurs progressistes commencent à se faire entendre, dans des revues comme Socialter ou Fast Company. En tout cas, ce point de vue-là prend de l’ampleur. C’est cela que j’essaie de théoriser dans “Empowerment ou la société de l’anti-délégation“. Et il est important que la reprise en main de ses activités professionnelles par la population ne se développe sur un repli national ou identitaire, contre l’étranger ou l’immigré. Si ça vous parle, développons une réflexion et des actions dans cette direction ! 😉

* Références aux numéros de pages du programme du Parti Populaire.

One Reply to “Ne laissons pas la défense des petits indépendants à la droite réactionnaire (et raciste)…”

  1. Yves,
    Cette article pourrait être suivi d’un article dans la même veine mais sur les médias et la manipulation car voilà un levier de manipulation énorme.
    Par contre, à l’ instar du journal édité par le parti populaire, editer une littérature, un journal , un pamphlet sur les libertés,les idées , les façons de vivre l’anti délégation, de devenir un jeune ou moins jeune entrepreneur avec des idées saines et généreuses serait sûrement un bon vecteur…

Leave a Reply to quentin Cancel reply

Your email address will not be published. Required fields are marked *

*