Les “Devoirs” de Cicéron (3) : Justice, courage et bonne foi

Poursuivons avec cette petite série basée sur le texte de Cicéron : Les Devoirs [De Officiis] !

Pour rappel, les deux premiers textes portaient sur :

  1. Le concept de “phronèsis” : la connaissance doit permettre de prendre de bonnes décisions.
  2. L’idée que la vertu réside dans l’action.

La première division des “devoirs” concernait donc la connaissance de la vérité, qui devait être tournée vers l’action. La deuxième division est celle qui “maintient le lien social entre les hommes et, pour ainsi dire, la communauté de vie“.

Et ce “maintien de la communauté de vie” prime sur le reste :

[#158] tout devoir qui tend à sauvegarder les liens entre les hommes, et la société, doit être mis au-dessus du devoir qui consiste dans la connaissance et la science.

[#155] D’où l’on comprend qu’aux études et aux devoirs de la science, il faille préférer les devoirs de la justice: ils concernent l’intérêt de l’homme et rien à l’homme ne doit être plus cher.

Et cette vertu comporte deux subdivisions :

[#20] la justice, où brille le plus haut éclat de la vertu, dont les gens de bien tirent leur nom; à laquelle s’ajoute la bienfaisance que l’on peut aussi appeler ou bien bonté ou bien générosité.

Donc, pas de justice sans bienfaisance !

Un acte “juste” est, de plus, un acte “équitable” :

[#30] Aussi est-ce un bon précepte qui interdit d’accomplir tout acte dont on doute s’il est équitable ou non : l’équité en effet brille d’elle-même, le doute indique un dessein injuste.

Et dans le doute, on s’abstient donc de poser l’acte !

Enfin, la justice ne peut pas se faire sous le coup de la colère :

[#89] Jamais en effet celui qui arrivera en colère pour punir, ne tiendra ce juste milieu, qui se trouve entre le trop et le trop peu, qui plaît aux péripatéticiens.

Comme la justice est au-dessus de tout, l’homme “courageux” possède tous les mérites de la justice :

[#63] Aussi voulons-nous que les hommes courageux soient en même temps magnanimes, bons et francs, amis de la vérité et nullement trompeurs; or ce sont en plein les mérites de la justice.

Qui sont celles et ceux que nous pourrions appeler “courageux” ou “justes” selon cette définition aujourd’hui ?

Cicéron rajoute un élément important : le fondement de la justice, c’est “la bonne foi“, comprise comme :

[#23] la fidélité et la sincérité dans les paroles et les engagements pris.

(…)

croyons que la bonne foi, fides, a été ainsi appelée à cause de l’expression : que soit fait, fiat, ce qui a été dit, dictum.

Questions subsidiaires :

  1. Est-ce qu’une telle conception de la justice autoriserait, comme c’est le cas actuellement, des choses qui sont légales, mais totalement immorales ? Vous voyez, ces décisions à propos desquelles tout le monde se dit : “M’enfin, ce n’est pas possible !??“, et ce à quoi quelqu’un répond : ” – Si, si, ils ont le droit !“.
  2. Est-ce que les notions de “courage” et de “bonne foi” ne sont pas les notions les plus absentes du champ “politico-mediatico-intellectuel” actuellement ? (Quoi ? Poser la question, c’est déjà y répondre ??) 🙂

Image : Le Jugement de Salomon de Nicolas Poussin.

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