L’ignorance pousse à la servitude; le savoir rend libre. L’importance de l’instruction en démocratie

On fête aujourd’hui la naissance de Condorcet, mathématicien, philosophe, homme politique français, né le 17 septembre 1743.

Grande figure des Lumières, Condorcet est resté dans les mémoires pour de nombreuses contributions à la pensée occidentale moderne, comme ses prises de position, très tôt dans l’Histoire, contre l’esclavage, ou pour le droit de vote des femmes, sa pensée du système éducatif, et son “paradoxe de Condorcet” en matière de vote (lorsqu’on vote pour classer 3 propositions).

Mais je voudrais juste mettre l’accent sur un élément important pour moi : son idée de l’instruction publique comme élément central de la démocratie.

On pourrait synthétiser son idée comme ceci :

1) L’ignorance pousse à la servitude; le savoir rend libre.

“Celui qui ne sait pas écrire, et qui ignore l’arithmétique, dépend réellement de l’homme plus instruit, auquel il est sans cesse obligé de recourir (…) Celui qui n’est pas instruit des premières lois qui règlent le droit de propriété ne jouit pas de ce droit de la même manière de celui qui les connaît”.

On retrouve la même idée que dans Le Discours de la Servitude volontaire de La Boétie (voir ici) : liberté et égalité vont de pair. Si l’on est dépendant de quelqu’un d’autre, on n’est ni libre, ni son égal. (Dit autrement : une société où tous les individus sont égaux, où aucun n’est le serviteur d’un autre, est une société où tous les individus sont libres).

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Parution de la 4ème (et dernière) partie de ma série sur la radicalisation

La parution du dernier volet de ma série sur la radicalisation, dans la revue de la Fondation Ceci n’est pas une crise, tombe à point nommé, puisque j’y abordais la question de la radicalisation à l’extrême-droite, en miroir de la radicalisation islamiste.

  • A point nommé, parce qu’en France, il n’y a pas une semaine sans qu’il y ait une polémique d’ordre identitaire.
  • A point nommé parce qu’en Belgique, un mouvement étudiant d’extrême-droite, “Schild & Vrienden”, a récemment fait la Une des journaux… Et Lalibre.be annonçait hier qu’un quart des jeunes électeurs flamands souhaite un régime autoritaire en Flandre.

Je rejoins Anne-Emmanuelle Bourgaux (Ecole de Droit UMONS ULB) qui disait hier, sur La Première – RTBF, qu’il y a une URGENCE DÉMOCRATIQUE, au même titre qu’une urgence écologique.

[Extrait] : “Depuis les années 80, tout comme on a laissé se développer une réponse salafiste à la crise d’identité et
à la recherche de radicalité d’une partie de la jeunesse d’origine immigrée, on a laissé se développer des groupuscules identitaires auprès d’une jeunesse plus autochtone, tout autant en recherche d’identité, et de radicalité.”

Ce qui m’intéresse, c’est de comprendre comment, en 2018, une société comme la nôtre se retrouve avec des jeunes, élevés ici, qui partent en Syrie, et d’autres jeunes (au profil sociologique très proche), qui s’engagent dans des groupuscules néo-nazis.

… Comment en est-on arrivé là ??

5 facteurs liés à l’espérance de vie : JE décide de ma santé ! #Empower

Une meta-analyse récente, publiée dans la revue “Circulation” (American Heart Association), sur plus de 100.000 personnes, a montré que l’espérance de vie pouvait être augmentée de 14 ans pour les femmes et 12 ans pour les hommes*, grâce à 5 facteurs :

  • ne pas fumer**
  • ne pas être en surpoids
  • avoir une activité physique (de modérée à vigoureuse) > 30′ / jour
  • une alimentation saine
  • une consommation modérée d’alcool (1verre/jour –  1-2 verres/jour)

Ce sont tous des facteurs liés à notre style de vie. En fait, cette même étude montre que 60% des morts prématurées peuvent être attribuées à des facteurs liés au style de vie.
=> Ca veut dire que cela relève de CHOIX PERSONNELS !

JE décide ce que je mets dans ma bouche et dans mes poumons. JE décide si je bouge de mon fauteuil ou pas.

Bien sûr, il faudrait des vraies politique de santé, qui favorisent une alimentation saine, qui facilitent l’accès à des activités physiques, etc…. MAIS au final, c’est vous qui décidez ce que vous allez manger, et se lever de son fauteuil, sortir courir, faire des squats et des burpees ne coûtent rien… #yourchoice #yourlife #Empower #ThatsIt

* Explication : Cette étude montre qu’à 50 ans, les femmes peuvent augmenter le nombre d’années qui leur restent à vivre de 29 à 43,1 ans (donc vivre jusqu’à 93,1 ans au lieu de 79 ans), et les hommes de 25,5 à 37,6 ans (donc vivre jusqu’à 87,6 ans au lieu de 75,5 ans).

** C’est un bon exemple de l’intérêt d’une approche “Via Negativa” à la Nassim Nicholas Taleb : un tel impact sur l’espérance de vie est lié au fait d’ôter ce qui nous tue (tabac, mauvaise alimentation, excès d’alcool), plutôt qu’au fait de rajouter quelque chose (un traitement, un médicament) qui nous ferait vivre plus longtemps…

Référence de l’étude : “Impact of Healthy Lifestyle Factors on Life Expectancies in the US Population”, Circulation. 2018;137:00–00. Téléchargeable en PDF ici : https://healthmetrics.heart.org/impact-of-healthy-lifestyl…/

La participation, c’est…

 

La “participation” (citoyenne) recouvre tout un ensemble de conceptions, de pratiques, de procédures. Voici quelle en serait ma définition :

“La participation, c’est permettre aux gens de se mêler de ce qui les regarde”

Cette définition m’est venue à la lecture d’une citation du philosophe et poète, Paul Valéry (1871-1945) : “La politique est l’art d’empêcher les gens de se mêler de ce qui les regarde.”

… Du coup : la participation est-elle l’inverse de la politique ??

Vous avez une heure ! 😉  Three-Two-One… Go !

Parution de la 2ème partie de ma série sur la radicalisation

Parution de la deuxième partie de ma série sur la radicalisation, dans le n° 12 (avril 2018), de la revue numérique de la Fondation “Ceci n’est pas une crise”.

Ces réflexions sur la radicalisation feront partie du livre à paraître sur les notions d’empowerment et d’anti-délégation.

Ce deuxième article retrace l’historique, d’un Islam émancipateur à un Islam de survie, et fera, pour cela, un détour par les Etats-Unis, qui ont connu, avant la Belgique ou la France, un Islam des quartiers défavorisés, avec les Black Muslims et Malcolm X d’abord, puis les Five-Percenters, et finalement le Salafisme. Ce détour permet de comprendre la dimension identitaire de la radicalisation religieuse.

Lire l’article sur le site de la revue…

Référence :

Patte, Y. (2017), Désappropriation. Radicalisation. Abandon. A quoi se raccrocher ? (2/4), Revue numérique de la Fondation Ceci n’est pas une crise, n°12, avril, pp. 10-14.

“… Said no one ever !”. Personne ne dit jamais ça.

 

Et si on essayait de décrire la situation actuelle, en partir de ce que (presque) personne ne dit jamais ?

Exemple 1 : (Presque) personne ne dit “J’adore mon boulot ! Je m’y vois encore bien dans 10 ans !”, ou “Mon boulot est épanouissant, j’y trouve vraiment du sens, je suis fier de ce que je fais !”, ou “Chaque matin, j’ai hâte d’aller bosser !”, ou “La législation liée à mon secteur est vraiment adaptée à la réalité du terrain”, ou “L’organisation interne est hyper bien pensée, et les personnes aux postes clés sont extrêmement compétentes !”… Said No One EVER !

Au contraire, énormément de personnes se sentent frustrées dans leur emploi : mauvais fonctionnement, incompétence du n+1, du n+2, du n++….. , surcharge de boulot à cause de collègues trop souvent absents, harcèlement, sentiment de ne servir à rien, de faire toujours la même chose, de ne pas être à sa place, de ne pas être reconnu à sa juste valeur, pré-burnout, burnout, bore-out, dépression, etc. Et surtout un sentiment généralisé que tout se dégrade, qu’avant on pouvait mieux travailler, qu’avant on était plus efficaces, qu’avant l’ambiance était meilleure…

Alors, bien sûr, avant, tout le monde n’aimait pas nécessairement son boulot, et il n’est pas difficile d’imaginer que passer 10 heures au fond d’une mine n’était pas “épanouissant”. Mais le monde d’hier se structurait probablement davantage entre ceux qui étaient fiers de leur boulot (et qui pouvaient être fiers de bien faire ce qu’ils devaient faire) et ceux qui n’étaient pas satisfaits, et qui se divisaient eux-mêmes entre ceux qui avaient conscience que collectivement ils pouvaient faire changer les choses (la « conscience de classe ») et ceux qui étaient complètement résignés. Toujours ce Fight or Flight.

Aujourd’hui, tout cela semble brouillé, et nous sommes nombreux à surnager, entre deux eaux, comme si on attendait que quelque chose arrive. Un C4 ? L’effondrement du système ? Un burnout ?

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L’affaire ORES : Exemple parfait d’une crise de la délégation

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Après le scandale Publifin, c’est à ORES, l’opérateur des réseaux gaz et électricité en Wallonie, de se retrouver sous le feux des projecteurs. En mars de cette année, Le Vif l’Express titrait “Intercommunales : 20 milliards. La facture d’un système“. Sous-titre : “Depuis 25 ans, le prix de votre électricité est surévalué… et les politiques ont fermé les yeux“. La plupart des médias ont repris l’information, et l’on développée. Au niveau judiciaire, une information est ouverte auprès du parquet. Et au niveau politique, le Ministre wallon des pouvoirs locaux a demandé un rapport à son administration. Autrement dit, on en parle beaucoup, et on va continuer à en entendre parler…

Mais sommes-nous, nous citoyens, capables de comprendre quelque chose à cette affaire ? Je voudrais essayer de vous expliquer tout cela, de la manière la plus simple et la plus exacte possible. Mon point de vue est celui d’un citoyen lambda, qui regarde l’ensemble du système, la “big picture“, avec un point de vue “extérieur”, “outside of the box“, un peu comme cet enfant de la fable des “Habits neufs de l’empereur” (Andersen) qui, hors des arcanes du pouvoir, peut dire tout haut ce qu’on ne s’autoriserait pas à dire dans les milieux initiés, dans la “box”, dans le système, etc…

D’autant plus que le coeur du problème est précisément une faillite des instances à qui nous avons délégué tout un ensemble de pouvoirs. Si vous me suivez depuis un petit temps, vous savez que c’est sur cette “crise de la délégation” que j’écris principalement depuis quelques années. Et face à toute crise de la délégation, les mouvements qui émergent sont dans une dynamique d’empowerment, de reprise en main des choses par les citoyens. Ici, c’est au niveau de l’énergie et de la démocratie locale que cette réappropriation d’un pouvoir citoyen pourrait émerger.

Bon. Partons d’une situation qui serait idéale en matière de gestion démocratique de la production et de la consommation d’énergie. Quel est l’engagement de la “démocratie représentative” ? C’est que nous puissions élire des personnes qui nous “représentent” pour prendre tout un ensemble de décisions à notre place, cela parce que la complexité d’une société fait que tout le monde ne sait pas à tout moment prendre part à toutes les décisions.

L’énergie est un enjeu extrêmement important, parce que nous sommes tous concernés, au quotidien, et que la manière dont nous produisons cette énergie a un impact potentiel sur toutes les personnes vivant sur notre territoire, et même sur celles qui naîtront dans le futur, en terme de pollution, de réchauffement climatique, etc.

Alors quelle est la chaîne décisionnelle sur cet enjeu fondamental ? Continue reading L’affaire ORES : Exemple parfait d’une crise de la délégation

Parution d’un de mes articles sur le site du Réseau Transition.be

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Le site Réseau Transition.be relaye mon analyse de l’enquête de la RTBF “Génération Quoi ?” consacrée aux 18-34 ans en Belgique francophone.

J’y reviens sur leur rapport à la politique et à l’engagement, ainsi que leur rapport aux études et au travail. Le point intéressant est qu’un tiers des jeunes se définissent eux-mêmes comme la “génération transition”.

J’avais publié cet article, sur mon blog, ici.

Je suis très flatté que le réseau Transition ait relayé ce texte. Je suis moi-même investi dans “Genappe en Transition“, le groupe d’habitants de Genappe qui se mobilisent, réfléchissent et agissent pour prendre en main la transition énergétique, écologique et politique à Genappe.

Je vous encourage vivement à aller jeter un coup d’oeil sur le site Réseau Transition.be

Regardez s’il y a des initiatives similaires dans votre commune. Et si ce n’est pas le cas, à vous d’en lancer une ! 😉

Nouvel article paru sur Usbek et Rica

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Populisme vs renouveau citoyen : que faire quand la société coule ?“, Usbek et Rica, décembre 2016.

L’époque actuelle peut paraître incompréhensible. D’un côté, l’accession au pouvoir de leaders populistes, la libération de la parole raciste et des déchaînements de haine envers les réfugiés ; de l’autre, l’émergence de mouvements citoyens qui consacrent, dans la veine du film Demain, des initiatives solidaires, de partage, éco-responsables. Analyse de ces dynamiques antagonistes, par Yves Patte, sociologue et lecteur participatif d’Usbek & Rica.

J’y développe cette métaphore du bateau qui coule, et des différentes voies qui émergent de cette situation-là. Une première version se trouve ici. Et c’est aussi la trame de fond de cette conférence, que j’ai donnée à Paris, en juin 2016… J’y rajoute des références au Brexit et à l’élection de Donald Trump.

Merci à Usbek et Rica d’avoir publié ce texte !! Déjà beaucoup d’échanges intéressantes à la suite de cette parution ! N’hésitez pas à me faire part de vos avis, de critiques, de votre vécu par rapport à cette situation, etc.